Organisation mondiale de la santé

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) est une institution spécialisée de l'Organisation des Nations unies (ONU) pour la santé publique créée en 1948. Elle dépend directement du Conseil économique et social des Nations unies et son siège se situe à Genève en Suisse, sur la commune de Pregny-Chambésy[1].

« OMS » et « WHO » redirigent ici. Pour les autres significations, voir OMS (homonymie) et Who.

Organisation mondiale de la santé
Organe de l'ONU
Type d'organisation Agence spécialisée de l'ONU
Acronymes OMS (WHO)
Directeur général Tedros Adhanom
Statut Active
Membres
Siège Pregny-Chambésy (GE)
Suisse
Création
Site web www.who.int/fr
Organisation parente Conseil économique et social des Nations unies

Selon sa constitution, l'OMS a pour objectif d'amener tous les peuples du monde au niveau de santé le plus élevé possible, la santé étant définie dans ce même document comme un « état de complet bien-être physique, mental et social et ne consistant pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ». Son actuel directeur général est Tedros Adhanom Ghebreyesus depuis le 1er juillet 2017[2],[3].

Histoire

Avant 1948

Vers 1850 différents dispositifs sont pris afin de mettre en place des mesures de quarantaines principalement destinées à protéger les États européens contre la peste.

À partir de 1851, des conférences sanitaires internationales ont lieu régulièrement mais se révèlent inefficaces et peinent à aboutir à des accords.

En 1892, la septième conférence permet la signature d'une Convention sanitaire internationale sur le choléra.

En 1897, signature d'une Convention sanitaire internationale sur la peste.

En 1902 et 1907, en partie à la suite des succès des conférences, le Bureau sanitaire panaméricain et l'Office international d'hygiène publique sont fondés.

En 1907, est créé à Paris « l'Office international d'Hygiène publique » (OIHP), doté d'un secrétariat permanent et d'un « comité permanent ». Ce comité organise plusieurs conférences au cours des années suivantes.

À la fin de la Première Guerre mondiale, les États-Unis s'opposent à ce que l'OIHP passe sous le contrôle de la toute nouvelle Société des Nations (SDN).

La grippe espagnole de 1918-1919, qui fit, selon les sources, entre 30 et 100 millions de morts (davantage de morts que la Première Guerre mondiale), poussa la Société des Nations (SDN) à créer le « comité d'hygiène » de la SDN, considéré comme l'ancêtre de l'OMS. Dominée par la France et le Royaume-Uni, la surveillance sanitaire du Comité couvre, à la fin des années 1920, 70 % du globe[4].

En 1926 la conférence de l'OIHP adopte une Convention sanitaire internationale contenant pour la première fois des dispositions relatives à la variole et au typhus.

Jusqu'à la Deuxième Guerre mondiale, trois organismes sanitaires internationaux coexistent : deux en Europe, l'OIHP et l'Organisation d'Hygiène de la Société des Nations, et un aux États-Unis, l'Organisation sanitaire panaméricaine constituera un troisième organisme international de santé[5].

Après la Seconde Guerre mondiale, les Nations unies vont absorber toutes les autres organisations de santé pour former l’OMS.

1948 : création de l'OMS

L'Organisation mondiale de la santé a été fondée le [6], après que sa constitution ait été votée lors de la conférence mondiale de la santé le 22 juillet 1946[7].

Années 1950

  • 1950 : suite à la découverte des antibiotiques, l'OMS conseille les pays pour un usage adapté[8].
  • 1950 : L'ONU effectue une campagne contre la tuberculose avec une inoculation massive du vaccin BCG, s'appuyant sur le service d'information épidémiologique par télex mis en place à partir de 1947.
  • 1951 : fondation du bureau régional pour l'Europe, travaillant au redressement sanitaire des pays ravagés par la guerre[8].
  • 1952 : début de campagnes mondiales de vaccinations contre la poliomyélite aboutissant à sa quasi-éradication[8].
  • 1958: Viktor Zhdanov, vice-ministre de la Santé de l'URSS, demande à l'OMS de lancer une initiative mondiale visant à éradiquer la variole, qui a abouti à la résolution WHA11.54. À cette époque, 2 millions de personnes mouraient de variole chaque année.

Années 1960

  • 1963 : Vaccinations contre la rougeole[8].
  • 1969 : Premier règlement sanitaire international pour la surveillance de 6 maladies infectieuses graves : choléra, peste, fièvre jaune, variole, fièvre récurrente et typhus[8].

Années 1970

  • 1972 : Programme visant à améliorer la santé sexuelle et reproductive[8].
  • 1974 : Programme de vaccination mondiale infantile[8].
  • 1975 : Programme sur 8 maladies tropicales, aboutissant à la quasi-éradication de 5 maladies[8].
  • 1977 : Première liste des médicaments nécessaires à un système de santé de base[8].
  • 1978 : déclaration d'Alma-Ata, objectif "Santé pour tous" fixant les bases de la revendication actuelle de l'OMS pour une couverture sanitaire universelle[8].
  • 1979 : La variole est éliminée[8].

Années 1980

Années 1990

  • 1995 : Programme DOTS visant à contrer le retour de la tuberculose[8].
  • 1996 : Création de la Division des maladies transmissibles[8].

Années 2000

  • 2002 : Disparition de la poliomyélite en Europe[8].
  • 2003 : Convention cadre l'OMS pour la lutte antitabac[8].
  • 2003 : SRAS : L'OMS lance une alerte globale le concernant les déplacements à destination de l'Asie et du Canada, sans y avoir été préalablement autorisée par les États, en raison de l'épidémie de SRAS, et s'oppose à la Chine concernant les statistiques et le développement de l'épidémie[4].
  • 2005 : Elargissement du règlement sanitaire international au delà des maladies spécifiques précédemment définies[8].
  • 2006 : Baisse de la mortalité infantile : le nombre d'enfants décédant avant 5 ans passe sous la barre des 10 millions par an[8].
  • 2008 : Les efforts sanitaires font passer les maladies infectieuses derrière les maladies non transmissibles[8].
  • 2009 : L'apparition du virus grippal H1N1 mène l'OMS à collaborer au développement de vaccins contre la grippe[8].

Années 2010

  • 2010 : Objectif d'atteindre une couverture sanitaire universelle[8].
  • 2012 : Objectifs mondiaux de prévention et lutte contre les maladies cardiaques, diabète, cancer et autres maladies non transmissibles[8].
  • 2014 : Lutte contre la flambée épidémique sans précédent du virus Ebola[8].
  • 2015 : Disparition du paludisme en Europe[8].

Structures

L'Organisation mondiale de la santé s'articule en deux séries de structures :

Siège à Genève

Siège de l'Organisation mondiale de la santé, à Pregny-Chambésy (GE).

L'OMS est dirigée par 197 États membres[9], réunis à l'Assemblée mondiale de la santé. Cette assemblée, composée des délégués représentant les États membres, a pour fonctions principales d'approuver le budget programme de l'OMS pour l'exercice biennal suivant et de statuer sur les grandes orientations politiques de l'Organisation. Cette assemblée vote à la majorité des deux tiers des conventions internationales sur la santé.

La Directrice de l'OMS Margaret Chan avec Bill Gates à l'Assemblée mondiale de la santé de 2011.

Les règlements sont votés par l'Assemblée mondiale de la santé à la majorité simple et ils entreront en vigueur pour tous les États membres sauf si ceux-ci refusent ou émettent des réserves dans les délais prescrits pour la notification.

Le Conseil exécutif est l'organe chargé d'administrer l'OMS. Ses 34 membres sont élus intuitu personæ pour trois ans par l'Assemblée. Le Conseil se réunit au moins deux fois par an. Ses principales fonctions sont d'appliquer les décisions et les directives de l'Assemblée mondiale de la santé et de lui indiquer des orientations.

Le Secrétariat est dirigé par le directeur général, nommé par les États membres pour une période de cinq ans, sur proposition du Conseil exécutif. Le personnel du Secrétariat de l'OMS se compose de professionnels de la santé, d'autres spécialistes ou experts et d'un personnel administratif travaillant au siège à Genève, dans les six bureaux régionaux et dans les pays.

En 2005, le total de ses effectifs étaient 3 996 agents dont 1 549 administrateurs. Le budget biennal de l’OMS était de 3,3 milliards de dollars pour les années 2006-2007[10].

Bureaux régionaux

Les zones régionales de l'OMS.

Les États membres sont répartis dans six groupes géographiques qui ont pour but de tenir compte des problèmes sanitaires propres à chaque région de la planète.

RégionSiègePays et régions concernésSigle
Asie du Sud-EstNew DelhiIndeBangladesh, Bhoutan, Birmanie, Corée du Nord, Inde, Indonésie, Maldives, Népal, Sri Lanka, Thaïlande, Timor orientalSEARO (South East Asia Region Office)
Méditerranée orientaleLe Caire depuis 2000ÉgypteAfghanistan, Arabie saoudite, Bahreïn, Djibouti, Égypte, Émirats arabes unis, Irak, Iran, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Maroc, Oman, Pakistan, Qatar, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Syrie, Tunisie, YémenEMRO (Eastern Mediterranean Regional office)
Alexandrie avant 2000
Pacifique occidentalManillePhilippinesAustralie, Brunei, Cambodge, Chine, Îles Cook, Corée du Sud, Fidji, Guam, Hong Kong, Japon, Kiribati, Laos, Macao, Malaisie, Îles Mariannes du Nord, Îles Marshall, Micronésie, Mongolie, Nauru, Niue, Nouvelle-Calédonie, Nouvelle-Zélande, Palaos, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Îles Pitcairn, Philippines, Polynésie française, Salomon, Samoa, Samoa américaines, Singapour, Tokelau, Tonga, Tuvalu, Vanuatu, Viêt Nam, Wallis-et-FutunaWPRO (Western Pacific Region office)
AmériquesWashingtonÉtats-UnisAntilles néerlandaises, Anguilla, Antigua-et-Barbuda, Argentine, Aruba, Bahamas, Barbade, Belize, Bermudes, Bolivie, Brésil, Îles Caïmans, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Dominique, République dominicaine, Équateur, États-Unis, Grenade, Guadeloupe, Guyana, Guyane, Haïti, Honduras, Jamaïque, Martinique, Mexique, Montserrat, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, Porto Rico, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Salvador, Suriname, Trinité-et-Tobago, Îles Turques-et-Caïques, Uruguay, Îles ViergesAMRO ou PAHO (Pan American Health Organization), en français OPS (Organisation panaméricaine de la santé)
AfriqueBrazzavilleRépublique du CongoAfrique du Sud, Algérie, Angola, Bénin, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Cap-Vert, République centrafricaine, Comores, République du Congo, République démocratique du Congo, Côte d'Ivoire, Érythrée, Éthiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée équatoriale, Guinée-Bissau, Kenya, Lesotho, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Maroc, Mauritanie, Île Maurice, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Swaziland, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie, ZimbabweAFRO
EuropeCopenhagueDanemarkAlbanie, Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Biélorussie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Israël, Italie, Kazakhstan, Kirghizistan, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Macédoine, Malte, Moldavie, Monaco, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Russie, Saint-Marin, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Tadjikistan, République tchèque, Turkménistan, Turquie, Ukraine, Royaume-Uni, OuzbékistanEURO

Directeurs généraux

NomPaysDate du mandatImage
Brock Chisholm Canada1948-1953
Marcolino Gomes Candau Brésil1953-1973
Halfdan T. Mahler Danemark1973-1988
Hiroshi Nakajima Japon1988-1998
Gro Harlem Brundtland Norvège1998-2003
Lee Jong-wook Corée du Sud2003-2006
Anders Nordström Suède2006-2007 (intérim)
Margaret Chan Hong Kong ( Chine)2007-2017
Tedros Adhanom Ghebreyesus ÉthiopieDepuis 2017

En raison du décès soudain de son directeur général, Lee Jong-wook, le , l'intérim de la direction est assuré par Anders Nordström, jusqu'à l'élection de son successeur, le Dr Margaret Chan, le 8 novembre 2006.

Financement

L'OMS est financée par des contributions des États membres et d'autres donneurs. Ces dernières années, l'OMS a multiplié les collaborations avec des organisations non étatiques : elle est actuellement en partenariat avec près de 80 groupes (ONG, industrie pharmaceutique et fondations caritatives telles que la Fondation Bill-et-Melinda-Gates et la Fondation Rockefeller).

Actuellement, les contributions à l'OMS provenant des gouvernements nationaux et régionaux, des fondations et ONG, d'autres organisations de l'ONU, et du secteur privé, excède celui des contributions évaluées (dues) provenant des 193 États membres[11]. L'OMS a en 2014 un budget d'environ 4 milliards de dollars pour environ 7 000 employés[12], et 5,8 milliards de dollars pour 2016-2017[13].

Actions

Domaines d'activité

Voici les grands domaines d’activité de l’OMS, avec quelques exemples :

  • Harmonisation, codification : classification de toutes les maladies. Pour cela, l’OMS réalise la Classification internationale des maladies (CIM) et maintient à jour une liste modèle des médicaments essentiels que les systèmes de santé de tous les pays devraient rendre disponibles à un prix abordable pour la population générale selon la déclaration de Montréal sur le droit fondamental aux médicaments essentiels.
  • Mesures sanitaires : prendre des mesures pour arrêter une épidémie et mesures sanitaires en cas de voyages internationaux (comme la vaccination). L’OMS a déclaré en 1980 que la variole avait été éradiquée, après plus de 2 décennies d'efforts dans la lutte contre cette maladie (c'est la première maladie de l’histoire à avoir été éradiquée par un effort humain). L’OMS est proche du succès dans le développement de vaccins contre le paludisme et la bilharziose, et a pour but d’éradiquer la poliomyélite dans les prochaines années.
  • Assistance aux PMA (pays les moins avancés) : vaccination contre les grandes maladies infectieuses, approvisionnement en eau potable, élimination des déchets, protection maternelle et éradication de certaines maladies.
  • Recherche :
  • Un programme global de lutte contre le sida, impliqué de diverses manières (accès aux soins, recherche, surveillance épidémiologique, etc.) : le HIV/AIDS Programme[15],[16]
  • Garantir l'accès à des médicaments de bonne qualité, sécurité, efficacité, grâce au programme de préqualification de médicaments. L'OMS préqualifie les médicaments de laboratoires demandeurs, pour que les institutions telles que l'UNICEF ou la PAHO puissent acheter ces médicaments en toute sécurité lors d'appels d'offres internationaux, en particulier pour des pays en développement qui ne peuvent assurer l'évaluation de ces médicaments par leurs propres moyens.
  • Fournir un appui technique aux États membres et responsables de la santé à renforcer les systèmes de santé pour offrir à tous des services adéquats et équitables. L'OMS s’appuie pour ce faire sur un cadre d’action unique composé de six éléments essentiels[17] et le développement d'outils techniques en matière de suivi et d'évaluation des systèmes de santé[18] et des personnels de santé[19].
  • Recueillir et diffuser des données sanitaires des 193 États membres de l’OMS[20],[21].
  • Avec l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), l'OMS édite le Codex alimentarius
  • CRVS (Civil Registration and Vital Statistics): ensemble de bonnes pratiques visant à garantir l'enregistrement des faits d'état civil de la naissance à la mort.

En plus de son travail d’éradication des maladies, l’OMS effectue diverses campagnes liées à la santé – par exemple, pour l’augmentation de la consommation de fruits et légumes dans le monde, et pour diminuer l’usage du tabac.

L'OMS-Europe a créé la Semaine européenne de la vaccination.

L’OMS conduit des recherches sur, par exemple, le fait de savoir si les champs électromagnétiques émanant des téléphones portables ont une influence négative sur la santé.

L'OMS compte un de ses membres dans le Conseil d'administration du Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, ou Fonds mondial.

Le 1er février 2016, l'OMS a appelé les gouvernements à appliquer une classification aux films comportant des scènes de consommation de tabac. Le but serait d’empêcher les enfants et adolescents de moins de 18 ans de commencer à fumer des cigarettes[réf. nécessaire].

Politiques de santé

Jusque dans les années 1960 la santé publique internationale a été dominée par des politiques de prévention (vaccinale et environnementale) plutôt que de traitement. L’absence de succès, hormis pour la variole et la polio, a entraîné des critiques. À la suite de l'échec relatif attribué au manque de ressources et au défaut d’observance l’importance a été portée sur les initiatives locales, la santé communautaire ainsi que sur l’implication des usagers et de la société civile.

Halfdan Mahler élu directeur général en 1973 a donné la priorité à la médecine sociale : considérer la santé plutôt que les maladies, utiliser des personnels non médecins dans les interventions sanitaires, inscrire la santé dans un ensemble comprenant l’éducation, la gestion de l’eau et l’alimentation, le tout dans le cadre de la lutte contre la pauvreté. Les médicaments destinés aux soins de santé primaire avaient la priorité. Cette orientation concernait tant les pays développés où les frais de médicaments s’envolaient souvent entraînés par une surconsommation ou une mauvaise utilisation, que les pays du Sud. En 1977, l’OMS sortait une liste de substances peu coûteuses permettant de traiter les maladies à forte prévalence. La liste partait des besoins et non de l’offre.

L’opposition à cette politique a été frontale. L’industrie pharmaceutique a contesté tant la composition de la liste que le principe même de son établissement. Elle la considérait comme un obstacle à l’optimisation des soins médicaux et au progrès. En 1979, l’OMS augmentait la liste à 300 médicaments et ne la préconisait plus que pour le Sud. En 1986, sous l’influence de leurs industries pharmaceutiques, les États-Unis demandèrent à l’Assemblée mondiale de la santé (AMS) de modifier la politique de l’OMS. Celle-ci devait se limiter à des programmes verticaux de lutte contre les maladies prioritaires. À la suite du refus de l’Assemblée les États-Unis suspendirent le paiement de leur cotisation. Celle-ci représentait 25 % du total. En 1988, Mahler n’a pas été reconduit à la direction générale. Il a été remplacé par le libéral Hiroshi Nakajima. Les États-Unis ont repris une participation mais sous forme d’une contribution volontaire à des programmes ciblés hors contrôle de l’Assemblée mondiale de la santé.

Dans les années 1990 l’OMS est concurrencée par la Banque mondiale. Celle-ci réagit aux critiques concernant les conséquences des ajustements structurels sur la santé des populations. Très vite, les moyens qu’elle déploie pour l’amélioration de la santé se trouvent sans commune mesure avec ceux de l’OMS. Les critères d’action de la Banque mondiale n’étaient pas les mêmes que ceux de l’OMS. La Banque mondiale utilisait un indicateur d’efficacité (DALY) qui calculait le coût/bénéfice sur la base du nombre d’années de vie perdues par pathologie. L’OMS par contre avait une approche clinique plutôt que de rentabilité. Ainsi, dans la lutte contre la tuberculose, elle appliquait la stratégie DOTS. L’accent était mis sur le risque technoscientifique de résistance aux antibiotiques et de développement de souches multi-résistantes. Peu à peu l’OMS est marginalisée dans les politiques de santé. La Banque mondiale et les Fonds privilégient les partenariats publics-privés et les politiques de santé restent encore largement dans le domaine des États-nations[22].

Niveaux d'alerte

  • Niveau 1 : un nouveau virus est détecté chez les animaux. À ce stade, il n'existe aucun risque d'infection pour l'homme.
  • Niveau 2 : un virus circulant chez les animaux a provoqué des infections chez l'homme. C'est le début d'une menace de pandémie (épidémie à l'échelle internationale voire mondiale).
  • Niveau 3 : plusieurs cas de transmission à l'homme sont avérés, sans pour autant qu'il y ait transmission interhumaine.
  • Niveau 4 : la transmission interhumaine d'un virus, capable de provoquer des « flambées à l'échelon communautaire », est confirmée.
  • Niveau 5 : une pandémie est imminente, et des foyers infectieux sont repérés dans au moins deux pays.
  • Niveau 6 : début d'une pandémie.

Prise en compte de l'environnement et du climat

La dégradation de l'environnement étant une cause majeure de dégradation de la santé et de risque de maladies émergentes, pour tenter d’atteindre les ODD de l'ONU, l'OMS s'intéresse de plus en plus au bon état écologique et au concept de ville durable. En particulier l'air devient un enjeu crucial.

  • À la fin du XXe siècle, l'OMS lance un projet « Ville-Santé ». La ville y est considérée comme « un organisme qui vit, qui respire, et dont l'état de santé est étroitement lié à celui de ses habitants »[23] ; L'OMS dispose d'un réseau européen de villes-santé[24].
  • En 2000 puis 2004, un guide « Urbanisme et santé » est publié en anglais (Healthy Urban Planning) puis en Français[25], suggérant « une stratégie qui recentre les activités d'urbanisme autour du désir même de voir les populations des villes vivre en bonne santé » et promouvant une approche écosystémique et un urbanisme coopératif, systématique et ouvert, avec une Planification des ressources visant à réduire l’empreinte écologique de la ville et de ses habitants). Comment relever « le défi qui se pose désormais : imposer la santé des habitants comme premier critère avant d’esquisser tout projet d’urbanisme »[26]. En 2017 l'OMS encourage (via un rapport « Towards more physical activity in cities »[27]) quelques principes directeurs visant à "transformer les espaces publics de manière à promouvoir les modes de vie physiquement actifs, et d’accroître ainsi l’activité physique en milieu urbain" pour notamment limiter le risque d'obésité et de maladies chroniques induites par le manque d'activité physique. voir aussi : Roué‑Le Gall A., Le Gall J., Potelon J.‑L., Cuzin Y. Agir pour un urbanisme favorable à la santé – Concepts & Outils [Guide]. Rennes : EHESP, 2014 : 191 p. En ligne : http://www.ehesp.fr/wp‑content/ uploads/2014/09/guide‑agir‑urbanisme‑sante‑ 2014‑v2‑opt.pdf
  • En 2018 : en mars, parce que la population humaine vit de plus en plus en ville, et parce que « Plus de 80% des villes du monde dépassent les limites fixées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour la qualité de l’air (« plus de 50% des villes qui surveillent leur air signalent des niveaux au moins 3,5 fois supérieurs aux limites fixées par l’OMS », l’OMS a lancé un projet « Breathelife » ainsi qu’un appel à tous les urbanistes pour qu’il fasse de l’air leur priorité n°1[28].
    Pour cette conférence la participation à distance a été facilitée (diffusion en continu et en direct des sessions sur le web).
    Du 30 octobre au 1er novembre, l'OMS réunit à Genève sa Première conférence mondiale de l'OMS sur la pollution de l'air et la santé[29] (sous titrée « Améliorer la qualité de l'air, combattre les changements climatiques - sauver des vies »[30] et coorganisé avec ONU-Environnement, l'Organisation météorologique mondiale (OMM), la Coalition pour le climat et l’air pur (CCAC), le secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), la Commission économique des Nations-Unies pour l'Europe (CEE-ONU) et Groupe de la Banque mondiale)[29].

Critiques

Aspects généraux

Certains auteurs considèrent que dans les années 1980, l'OMS connut une certaine « traversée du désert » en raison de choix contestables (quasi-démantèlement du Bureau sur la tuberculose) et de l'hostilité de certains pays (États-Unis, Royaume-Uni) opposés à ce qu'ils considéraient comme une politique coûteuse[4], les enjeux sanitaires mondiaux étant alors pris en charge par des fondations privées ainsi que la Banque mondiale[4].

Lion Murard parle d'une « sorte de seconde naissance » de l'OMS[31]. En effet, l'OMS a alors créé la Division des maladies transmissibles (1996), le Global Outbreak Alert and Response Network (2001), chargée de signaler à Genève « tous les événements susceptibles de donner lieu à des urgences sanitaires de portée internationale » et non plus seulement les occurrences des trois pathologies quarantenaires traditionnelles : peste, fièvre jaune et choléra, et promulgué un nouveau Règlement sanitaire international (adopté en 2005) qui dépossède les gouvernements de leur droit de veto sur le renseignement épidémiologique[4] et accompagne le développement dans tous les pays de systèmes efficients de surveillance épidémiologique.

Selon l'historien Patrick Zylberman, ce retour de l'OMS s'explique largement par des ré-émergences épidémiques[4] telles que celle du sida, de la tuberculose (en 1985-91 à New York), de la peste (en Inde en 1994), de l'Ébola (au Zaïre en 1995), etc.

Collusion ou conflit d'intérêt avec l'AIEA

Article détaillé : Independent WHO.

Depuis près de 20 ans, une controverse porte sur un accord liant l'OMS et l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Cet accord est entré en vigueur via la « résolution WHA12.40 » signée le [32]. Ses détracteurs reprochent à cet accord d'avoir comme particularité d'imposer la confidentialité sur des « renseignements spéciaux »[32] et certains sujets (à la discrétion de l'AIEA pour ce qui concerne le secteur du nucléaire), ceci afin de « sauvegarder le caractère confidentiel de renseignements qui leur auront été fournis. Elles [l'AIEA et l'OMS] conviennent donc que rien dans le présent Accord ne peut être interprété comme obligeant l’une ou l’autre partie à fournir des renseignements dont la divulgation, de l’avis de la partie qui les détient, trahirait la confiance de l’un de ses Membres ou de quiconque lui aurait fourni lesdits renseignements, ou compromettrait d’une manière quelconque la bonne marche de ses travaux »[32].

Il est à noter qu'un autre organe de l'ONU étudie l'exposition des populations aux rayonnements ionisants (particules radioactives) et que ses rapports annuels sont publics : le Comité scientifique des Nations unies pour l'étude des effets des rayonnements ionisants (UNSCEAR), d'organisation et fonctionnement similaire au Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC).

Entente avec les laboratoires pharmaceutiques

L'OMS a également été critiquée pour sa gestion de la crise du virus H1N1[33]. Selon un rapport de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, « De graves lacunes ont été identifiées en ce qui concerne la transparence des processus de décision liés à la pandémie, ce qui soulève des préoccupations sur l’éventuelle influence que l’industrie pharmaceutique aurait pu exercer aux égards des principales décisions relatives à la pandémie »[34]. Les conflits d'intérêts d'experts ont aussi été critiqués[35].

Notes et références

  1. (en) « League of Nations: Health Organization ».
  2. « Le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus prend ses fonctions de Directeur général de l’OMS », sur Organisation mondiale de la Santé (consulté le 12 décembre 2017)
  3. « L’Éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus élu directeur général de l’OMS – JeuneAfrique.com », JeuneAfrique.com, (lire en ligne, consulté le 12 décembre 2017)
  4. Patrick Zylberman, « L’épidémie, c’est l’homme autant que le microbe », Medecinenews, 30 avril 2009.
  5. « Feuille d'Avis Officielle du 22 juillet 1996 ».
  6. « L'Organisation mondiale de la santé Au cœur de sa réforme » [PDF], sur europarl.europa.eu,
  7. United Nations. Economic and Social Council.; International Health Conference, Actes de la Conférence Internationale de la Santé : qui s'est tenue à New York du 19 juin au 22 juillet 1946, New York, Lake Success and New York : United Nations, , 60 p. (OCLC 314222472).
  8. « Santé : de grands pas franchis en 70 ans », sur www.euro.who.int (consulté le 9 octobre 2019).
  9. Depuis l'adhésion du Monténégro, le 29 août 2006, les seuls États non membres de l'OMS sont le Liechtenstein et le Saint-Siège.
  10. Source : Ministère français des Affaires étrangères.
  11. « Projet de budget programme 2006 - 2007 ».
  12. « ONU : l'OMS, une image écornée (5/7) », Les Échos, 2 octobre 2015.
  13. Financement du Programme 2016 - 2017
  14. (en) WKC center.
  15. WHO | WHO and HIV/AIDS.
  16. WHO | HIV/AIDS topical information.
  17. « Stratégie de l’OMS en faveur des systèmes de santé », sur Organisation mondiale de la santé.
  18. « Monitoring the building blocks of health systems: a handbook of indicators and their measurement strategies », sur Organisation mondiale de la santé.
  19. « Manuel de suivi et d’évaluation des ressources humaines pour la santé ».
  20. « Données et statistiques », sur Organisation mondiale de la santé.
  21. Global Health Atlas.
  22. Dominique Pestre (sous la direction de), ’’Le gouvernement des technosciences’’, La Découverte, 2014, p. 65 à 92.
  23. Présentation du guide OMS "Urbanisme et santé" (publié en 2000 en anglais, et 2004 en français)
  24. OMS rapport intitulé « Towards more physical activity in cities »
  25. OMS (2004) Guide Urbanisme et santé ; Un guide de l’OMS pour un urbanisme centré sur les habitants , rédigé par Hugh Bar ton et Catherine Tsourou (S2D Association internationale pour la promotion de la Santé et du Développement Durable); PDF, 194p ; traduction (2004) du guide Healthy Urban Planning publié en 2000
  26. Développer un urbanisme favorable à la santé : une obligation morale Revue INPES ; La santé en action n° 434 – Décembre 2015 (voir p 14/56)
  27. OMS Vers plus d’activité physique dans les villes. Transformer les espaces publics en vue de promouvoir l’activité physique – un facteur clé pour la réalisation des objectifs de développement durable en Europe (2017, en anglais uniquement)
  28. OMS (2018) La santé doit être la priorité numéro un pour les urbanistes , 21 mars 2018
  29. OMS, 2018 Première conférence mondiale de l'OMS sur la pollution de l'air et la santé 1 WHO’s First Global Conference on Air Pollution and Health Improving air quality, combatting climate change – saving lives
  30. Improving air quality, combatting climate change – saving lives
  31. Lion Murard, Des épidémies et des hommes, La Martinière, 2008. Cité par Patrick Zylberman, « L’épidémie, c’est l’homme autant que le microbe », Medecinenews, 30 avril 2009.
  32. « Accord entre l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique et l’Organisation Mondiale de la Santé », sur Wikisource.
  33. David Leloup, « OMS : Manque de transparence et d'indépendance », Politique, revue de débats, Bruxelles, no 67, nov.-déc. 2010.
  34. Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, « La gestion de la pandémie H1N1 : nécessité de plus de transparence », rapport, 7 juin 2010.
  35. Deborah Cohen et Philip Carter, « Conflicts of interest. WHO and the pandemic flu « conspiracies », British Medical Journal, 2010 ; 340:1274-9.

Annexes

Articles connexes

  • Journée mondiale de la santé
  • Projet High 5s, un projet international lancé par l’Alliance mondiale pour la sécurité du patient de l’Organisation mondiale de la santé en 2006.
  • Organisation mondiale de la santé animale
  • Première conférence mondiale de l'OMS sur la pollution de l'air et la santé

Liens externes

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